Faut-il apprendre en immersion la langue de votre pays d’adoption ?

Depuis la démocratisation d’Internet, apprendre une langue étrangère n’a jamais été aussi facile. On pourrait presque parler de révolution de l’apprentissage. Mais internet peut-il vraiment remplacer une immersion totale dans une culture et une langue étrangère ?

Une assimilation et une mise en pratique plus rapides

 

Pour l’apprenant ayant la possibilité de voyager, l’apprentissage de la langue en immersion est la clé pour une assimilation optimale. Sur place, l’expatrié peut facilement mettre en pratique tout ce qu’il apprend. Cela commence dès l’entrée sur le territoire, avec les formalités locales, la signature d’un bail, l’ouverture d’un compte en banque, d’une ligne téléphonique… L’expatrié directement envoyé par l’entreprise pourra voir ces formalités déjà accomplies. Quand bien même, il se retrouvera vite confronté à sa nouvelle réalité : faire les courses, régler une facture, répondre au téléphone… En immersion, l’apprenant est bien plus sollicité qu’il ne l’est lorsqu’il étudie dans d’autres configurations. C’est toute la journée qu’il est amené à penser et à interagir dans la langue de son pays d’expatriation. L’on parle cependant bien d’un apprentissage actif. Car rien n’est automatique. C’est en se plongeant au milieu des locaux que l’expatrié pourra assimiler et mettre en pratique son apprentissage. A contrario, il est tout à fait possible de recréer une immersion si l’on ne souhaite pas s’expatrier.

 

Si rejoindre une communauté d’expatriés s’entend lors de l’arrivée sur le territoire, ne rester qu’avec cette communauté peut compromettre l’apprentissage de la langue locale. Même en immersion, l’apprenant doit faire l’effort de sortir de sa zone de confort pour aller au contact des locaux. La frustration qu’il rencontrera – ne pas pouvoir communiquer comme il le souhaite – sera, paradoxalement, un moteur. Apprendre une langue en immersion invite à l’humilité. L’expatrié a besoin des autres pour apprendre, et s’enrichit au fur et à mesure de ses interactions.

 

L’anglais ne suffit-il pas ?

 

L’anglais reste la langue la plus parlée au monde, avec 1348 millions de locuteurs en 2021. Viennent ensuite le mandarin (1120 millions), l’hindi (600 millions ; chiffres Statista). En parallèle, EF (Education First) sort, en 2020, son classement des pays en fonction de leur niveau d’anglais. 5 catégories : niveau très élevé, élevé, intermédiaire, bas, et très bas. Les Pays-Bas s’imposent comme le pays où l’on parle le mieux anglais (niveau très élevé). Plus largement, l’Europe concentre la majorité des États ayant un très bon ou bon niveau d’anglais, mais avec des disparités selon les pays. Le bilan est plus contrasté pour les autres continents. Seuls deux pays d’Afrique et d’Asie sont considérés comme très bons en anglais et l’Amérique latine est grande perdante de ce classement avec 1 seul pays recensé. De fait, l’anglais est loin de s’imposer partout. Si sa maîtrise est indispensable dans beaucoup de domaines professionnels, elle ne garantit pas forcément une expatriation réussie dans les pays non anglophones. Pays très appréciés des expatriés, la Thaïlande, le Japon ou la Corée du Sud affichent un niveau d’anglais bas, selon EF.

 

Un meilleur décodage des subtilités de la langue

 

Comment négocier un contrat avec un interlocuteur brésilien, japonais, kenyan ? Apprendre une langue étrangère en immersion permet une meilleure appréhension du monde du travail et de ses codes. L’erreur commise par beaucoup est de se reposer sur l’anglais. Au contraire, apprendre la langue locale rend l’expatrié plus à l’aise dans son entreprise (qu’elle soit locale ou internationale), et plus vite opérationnel. Il comprendra mieux sa nouvelle culture d’entreprise, participera activement aux réunions, saisira les particularités du langage des affaires. Toutes ces compétences acquises sur le terrain lui vaudront la confiance et le respect de ses supérieurs et collègues. Il ne sera plus forcément cantonné au pôle international, mais pourra viser les postes nécessitant de parler, lire et écrire la langue locale. Par sa persévérance dans l’apprentissage, l’expatrié montre qu’il n’est pas là par hasard. Il assimile et met en pratique. Réactif, il apprend de ses erreurs, afin de ne pas retomber dans les mêmes travers. C’est le cas de Carlo, italien expatrié en France depuis 2011, qui a vite compris que son intégration passerait par l’apprentissage du français !

 

Un incident diplomatique a fait le tour du monde en 1969, qui illustre parfaitement ce point de vue : rencontre tendue entre le président américain Nixon et le Premier ministre Sato concernant les exportations japonaises de textile aux Etats-Unis. Nixon exige une réduction de flux massifs de textiles importés aux Etats-Unis, Sato répond par l’ambigu zensho shimasu, soit « Je ferai le meilleur concernant cette situation ». Les américains interprètent cette réponse par la positive mais en réalité, « zensho shimasu » est une formule négative. Nixon est furieux. Les tensions entre les deux pays augmentent d’un cran. De tels incidents ont toujours lieu aujourd’hui, faute de compréhension entre les subtilités du japonais et les interprétations étrangères. Cela expliquerait en partie la difficulté, pour les entreprises étrangères, de s’implanter au Japon, et celle, pour les étrangers, de s’intégrer dans les entreprises japonaises.

 

Les mêmes incompréhensions sont transposables pour les autres langues/cultures. Travailler en Inde suppose d’en connaître la hiérarchie, très stricte et les codes. Il est coutume de négocier un contrat avec un partenaire de même rang que soi et d’employer de nombreuses formules de politesse à grands renforts de sourires. La rudesse et l’empressement sont le meilleur moyen de tuer tout échange commercial. Les relations d’affaires avec des négociateurs russes réservent d’autres subtilités. Le mot « compromis » est à éviter, car connoté négativement côté russe. A contrario, on pourrait penser que l’expression « c’est difficile » rendrait les négociations compliquées alors que c’est une marque d’ouverture. Autant de subtilités, de champs lexicaux que l’expatrié devine mieux en apprenant la langue en immersion, quelle que soit sa forme (orale, langue des signes, braille).

 

Apprendre en immersion : un accélérateur d’intégration

 

Apprendre la langue de son pays d’expatriation en immersion booste la confiance en soi. L’expatrié voit ses efforts rapidement récompensés. Les leçons étudiées avant son expatriation trouvent leur application concrète une fois arrivé dans le pays. Prendre les transports en commun, commander un plat au restaurant, faire ses courses, passer un entretien d’embauche… En étant sur place, l’expatrié peut observer les locaux et assimiler leurs manières de faire. Ce mimétisme ne présente que des avantages. Tout comme l’enfant imprime ses apprentissages en regardant son environnement, l’étranger consolide mieux ses acquis en immersion dans son pays d’expatriation. Raison pour laquelle les contacts fréquents avec les locaux sont à privilégier : loger, travailler, étudier au contact des natifs, pratiquer une activité sportive, de loisirs… Tous les domaines de la vie sont concernés.

 

La langue fait partie de l’idiome qui définit une culture : elle résulte de de l’histoire d’une nation et reflète sa logique, ses systèmes de pensées. C’est en s’adaptant à sa patrie d’adoption que l’on crée les bases d’une belle relation, solide et durable. Apprendre la langue de son pays d’expatriation, c’est une formidable main portée vers ses futurs amis et le premier pas d’une intégration réussie dans sa nouvelle vie professionnelle.

 

Article rédigé en partenariat avec Expat.com